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  • vendredi 6 novembre 2015

    Nos Iles éparses et l’escalade française


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    Le silence intolérable de notre chef d’Etat actuel et de son gouvernement encourage l’escalade de la France dans sa volonté d’usurper la souveraineté de Madagascar sur les Iles éparses du canal de Mozambique et sur Tromelin. Une étape supplémentaire et menaçante vient d’être franchie avec le renforcement anticipé prévu début 2017 des forces navales françaises à La Réunion. (Voir ci-joint l’article en page 6 du Quotidien de La Réunion en date du 02/11/2015) La récente déclaration de l’ambassadrice française à Antananarivo n’est en fait que le reflet de la politique plus agressive de la France déjà exprimée ouvertement en avril 2013 par Victorin Lurel, à l’époque Ministre français des outremers, lors d’une visite à La Réunion, aux Iles éparses et à Tromelin. Fidèle à son objectif qui est d’informer afin de défendre les intérêts vitaux de la Grande Ile, Madagascar Résistance avait alors réagi fermement dans sa Lettre n°99. Nous avons été bien seuls car aucune réaction n’est hélas venue de nos dirigeants. Les propos de Victorin Lurel avaient pourtant été largement diffusés dans les médias de La Réunion et ne pouvaient pas ne pas avoir été portés à la connaissance de notre chef d’Etat et de son gouvernement


    Pour lire l’intégralité de nos lettres et documents de référence, consultez notre blog à l’adresse :http://Madagascar-Resistance.blog4ever.com


    Madagascar Résistance

    Lettre numéro 99 – avril 2013
        
    Victorin Lurel dans les Iles éparses : l’oubli de l’héritage d’Aimé Césaire

    1947 : VINCENT AURIOL, SOCIALISTE, A LA PRÉSIDENCE DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ; Paul Ramadier, socialiste, à la tête du gouvernement français; Marius Moutet, socialiste, ministre de la France d’outre-mer. Mais à Madagascar, on tue cent mille Malgaches, on torture, on brûle les villages.

    2013 : FRANÇOIS HOLLANDE, PRESIDENT SOCIALISTE ; Jean-Marc Ayrault, socialiste, à la tête du gouvernement français. Mais Victorin Lurel, socialiste, ministre des Outre-mer, Antillais de surcroît, renie l’héritage d’Aimé Césaire et adopte, lors de sa récente visite dans l’Océan Indien, une posture coloniale plus dure que celle de la droite française.

    IL Y A COMME UNE FATALITE QUI POUSSE LES SOCIALISTES FRANÇAIS A RENIER TOUTES LEURS VALEURS DES LORS QU’ILS SONT EN DEHORS DE L’HEXAGONE. Alors que les conventions internationales imposaient le respect des frontières coloniales au moment des retours à l’indépendance des colonies, la France avait soustrait unilatéralement Tromelin et les Iles Eparses du Canal du Mozambique de la souveraineté de Madagascar. La condamnation unanime et persistante par les Nations Unies et l’Union Africaine qui s’en suivit, ainsi que les faibles chances pour la France de l’emporter en cas d’arbitrage juridique international, ont amené les gouvernements français de droite de ces dernières années à laisser une chance à d’éventuelles négociations futures, en évitant une médiatisation de ce contentieux qui les oppose à la Grande Ile, même si des mesures de renforcement des liens institutionnels de Tromelin et des Iles Eparses avec la France avaient été prises avec leur intégration dans les TAAF. (Voir sur notre blog nos Lettres numéros 30, 31 et 32). C’est donc un ministre socialiste, Antillais de surcroît, qui a estimé nécessaire de tenir aujourd’hui des propos colonialistes dignes d’une autre époque, en faisant « un tour du propriétaire » dans ces îles en litige.

    Le Quotidien de La Réunion a consacré à ce voyage très médiatisé plusieurs reportages dont nous présentons quelques extraits : «Visiblement de bonne humeur….le ministre des Outre-mer a rappelé à plusieurs reprises qu’il devenait l’un des rares hommes d’Etat à avoir effectué le déplacement dans le district des Iles Eparses ». Faisant preuve d’une véritable schizophrénie, le ministre solidaire du tiers-mondisme de Hugo Chavez s’est tout d’un coup transformé en colonisateur lors de ce périple entre Tromelin et les Iles Eparses du Canal de Mozambique. Aucune trace de solidarité envers Madagascar, ancienne colonie que l’on veut encore spolier d’une partie de ses ressources. Comme si, pour Victorin Lurel cette solidarité, normale envers un Etat des Caraïbes ou d’Amérique Latine, cessait d’être une exigence dans cette partie du monde. Les propos tenus à La Réunion, à Tromelin et aux Glorieuses par ce même ministre qui avait pourtant, quelques jours auparavant, bravé le politiquement correct occidental en faisant l’éloge du patriotisme et du sens de l’Etat de Hugo Chavez lors des obsèques de ce dernier, font de lui un digne héritier de Galliéni. Quel étrange destin pour un compatriote d’Aimé Césaire, et de Frantz Fanon !

    « Il est bien que la France réaffirme sa présence… Aller là-bas, c’est affirmer une souveraineté ». « Nous sommes chez nous, et on y va de bon droit. On n’a pas à lever le doigt …. Il est bon de le dire, sans être arrogant ». Le Quotidien rapporte encore : « … à chaque fois, le ministre a martelé le même message : la souveraineté de la France aux Eparses est multi-séculaire, légitime et ne souffre aucune contestation ».

    Souveraineté imposée du temps de la colonisation sur des îles à des dizaines de milliers de kilomètres de la France : où est la légitimité ?

    Souveraineté qui aurait dû prendre fin en 1960, au retour de l’indépendance de Madagascar à laquelle les Iles Eparses étaient rattachées : voilà pourquoi le ministre se garde bien d’évoquer une quelconque légalité.

    Souveraineté sur Tromelin revendiquée par les deux pays qui devraient être les derniers au monde à oser le faire : la France dont la pratique de la traite des esclaves a été à l’origine de l’abandon d’une soixantaine de Malgaches sur cet îlot en 1761, et Maurice, destinataire de ce trafic humain.

    En réalité, l’annonce des résultats considérés comme prometteurs, de la recherche de pétrole et de gaz au large de Juan de Nova (qui ne se trouve qu’à 150 km des côtes malgaches, mais la loi du plus fort prime pour l’instant), explique cette remarquable continuité de la politique françafricaine à Madagascar, sous Nicolas Sarkozy comme sous François Hollande.

    LE SOMMET DE L’INSUPPORTABLE POUR LES MALGACHES A ETE ATTEINT LORS DES PROPOS TENUS PAR VICTORIN LUREL A TROMELIN.

    Ainsi, voilà une île plus proche de Madagascar que de Maurice (dont les revendications de souveraineté ne reposent sur aucune assise, juridique ou autre mais avec qui la France a signé en 2010 un accord de co-gestion !) ; voilà une île ayant fait partie des dépendances de Madagascar pendant la colonisation, et devant donc lui revenir au retour de l’indépendance ; voilà une île dont les premiers et seuls habitants furent des Malgaches, contraints d’y vivre dans des circonstances tragiques. Victorin Lurel balaie d’un revers de main tous ces arguments et réaffirme haut et fort la souveraineté de la France.Jusque là, il ne fait que réitérer, même si cela est parfaitement contraire aux conventions internationales, la position arrogante des gouvernements français qui se sont succédés depuis De Gaulle. Mais ce qui rend ses propos plus odieux, et totalement insupportables, c’est qu’il a ajouté l’hypocrisie à l’illégalité et à l’injustice . Lui, l’Antillais, s’est senti obligé de paraître solidaire de ces quelques dizaines de Malgaches réduits en esclavage et abandonnés sur Tromelin par des trafiquants français d’esclaves, après un naufrage. Il a cru bon de rendre hommage à l’esprit de résistance et à la créativité de ces Malgaches qui sont parvenus à survivre plusieurs années sur cet îlot dénué de tout : « Abandonnés, oubliés, sans ressources, ces Malgaches réussissent contre toute attente à survivre, mais aussi à construire une société organisée et à vivre debout. Cet instinct de survie, ce sens de l’organisation, cet élan de civilisation, apportent un cinglant démenti à ceux qui leur avaient dénié toute humanité en les arrachant de force à leurs hauts-plateaux, en les mettant aux fers, en les destinant à des vies d’esclaves ».

    Nonobstant quoi, il dénie aux Malgaches tout droit sur cet endroit !

    En malgache cela se dit « maneso ». C’est-à-dire se moquer sous des dehors polis et affables. Mais à Tromelin, ce ne sont pas seulement des Malgaches vivants dont Victorin Lurel s’est moqué. Il s’est moqué aussi des Ancêtres qui y ont perdu la vie. Car en clair, voici le sens réel du message qu’il a passé : Oui, vous avez été les premiers habitants de cet îlot, vous y avez souffert, presque la totalité d’entre vous y a perdu la vie, certainement dans de très grandes souffrances, mais cela ne vous donne aucun droit. Car vous étiez des esclaves et seuls les Français qui ont fait naufrage ici et qui vous y ont abandonnés ont un droit de propriété sur cet endroit.

    L’INDIGNATION QUE SUSCITE CE VOYAGE COLONISATEUR ET PROFANATEUR D’UN MINISTRE FRANÇAIS, ANTILLAIS DE SURCROIT, NOUS FAIT RETROUVER AVEC BONHEUR ET DETERMINATION AIME CESAIRE. Il disait :«…. Balaie-moi tous les obscurcisseurs, tous les inventeurs de subterfuges, tous les charlatans mystificateurs, tous les manieurs de charabia. Et n’essaie pas de savoir si ces messieurs sont personnellement de bonne ou de mauvaise foi, s’ils sont personnellement bien ou mal intentionnés, s’ils sont personnellement, c’est-à-dire dans leur conscience intime de Pierre ou Paul, colonialistes ou non, l’essentiel étant que leur très aléatoire bonne foi subjective est sans rapport aucun avec la portée objective et sociale de la mauvaise besogne qu’ils font en tant que chiens de garde du colonialisme. » (Discours sur le colonialisme)

    Les richesses halieutiques et sous-marines des Iles Eparses ont inspiré à Victorin Lurel, homme de gauche, Antillais de surcroît, des accents conquérants que la presse réunionnaise a qualifiés de « gaulliens ». Ne sommes-nous pas dans une phase de réveil des vieux démons que l’on croyait appelés à disparaître ? Car il y a dans ces propos « gaulliens » un air de déjà entendu.Un air déjà entonné dans le passé par « …tous ceux qui jugeaient et jugent licite d’appliquer aux peuples extra-européens, et au bénéfice de nations plus fortes et mieux équipées, une sorte d’expropriation pour cause d’utilité publique » (Discours sur le colonialisme) dénoncé par Aimé Césaire.

    C’EST ENCORE A AIME CESAIRE QUE NOUS LAISSONS LA PAROLE POUR CONCLURE CETTE LETTRE A LAQUELLE NOUS AVONS VOULU DONNER LA FORME D’UN MIROIR RENVOYE A VICTORIN LUREL,ANTILLAIS D’AUJOURD’HUI, ENTRE DANS LE SYSTEME DE DOMINATION POLITIQUE ET SOCIALE HERITE DE LA COLONISATION.

    Pour lui rappeler son héritage, et d’où il vient. Aimé Césaire disait : « …La malédiction la plus commune en cette matière est d’être la dupe de bonne foi d’une hypocrisie collective, habile à mal poser les problèmes pour mieux légitimer les odieuses solutions qu’on leur apporte. Cela revient à dire que l’essentiel est ici de voir clair, de penser clair, entendre dangereusement, de répondre clair à l’innocente question initiale : qu’est-ce en son principe que la colonisation ? De convenir de ce qu’elle n’est point ; ni évangélisation, ni entreprise philanthropique, ni volonté de reculer les frontières de l’ignorance, de la maladie, de la tyrannie, ni élargissement de Dieu, ni extension du Droit, d’admettre une fois pour toutes, sans volonté de broncher aux conséquences, que le geste décisif est ici de l’aventurier et du pirate, de l’épicier en grand et de l’armateur, du chercheur d’or et du marchand, de l’appétit et de la force….. » (Discours sur le colonialisme)


    Face à l’appétit et à la force, il reste aux opprimés la faculté de s’indigner.

    De se remettre debout malgré les coups reçus.

    Et d’engager contre le colonialisme sous toutes ses formes le combat sans merci auquel Frantz Fanon, autre grand Antillais, appelle tous ceux qui sont épris de liberté et de justice !


    Les Inconditionnels de Madagascar, À l’Ile de la Réunion

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