Jamais dans l'histoire de Madagascar ou sans doute de l'histoire tout court, un ancien président forcé à l'exil suite à un Coup d'Etat n'a autant mobilisé ses supporters un an et demi après son départ. Malgré une campagne de diabolisation et de désinformation orchestrée par le pouvoir de fait actuel et par une certaine presse, Marc Ravalomanana restera sans doute dans la mémoire collective comme celui qui avait toujours choisi la voie des urnes pour affronter ses adversaires pendant que la classe politique traditionnelle préférait choisir la voie de la rue, et surtout comme le premier président à entreprendre les plus grands travaux d'infrastructure et de construction de routes jamais réalisés à Madagascar.
Qui se cache réellement derrière cet homme actuellement éloigné de la scène politique et du pouvoir mais qui suscite toujours autant d'intérêt de la part de ses partisans que de ses détracteurs ? Ne dit-on pas non plus que la grandeur d'un homme se mesure au nombre de ses ennemis ? Le fait que l'on cherche à tout prix à effacer toutes traces laissées par Marc Ravalomanana ou à interdire le rassemblement de ses partisans sur la "place de démocratie" montre à quel point cet homme est craint par le gouvernement insurrectionnel actuel. Mais toutes ces mesures n'ont pas empêché le Peuple privé de sa liberté, d'exprimer leur mécontentement en huant Andry Rajoelina à chacune de ses sorties (un cas unique au monde). On n'efface pas ainsi d'un coup de baguette magique la mémoire d'un Peuple.
La popularité de Ravalomanana dépasse le seul cadre de la capitale
L'inexistence d'une base d'étude d'opinions politiques dans notre pays amène à toute sorte de fantasme chez certains éditorialistes et hommes politiques sur la popularité réelle de Ravalomanana. Déjà, lors de la dernière élection présidentielle, un certain Roland Ratsiraka avait déclaré qu'il affronterait Ravalomanana au second tour, il n'avait finalement obtenu que 10 % de voix et relégué en troisième position. Actuellement, certains éditorialistes allaient même jusqu'à pronostiquer que les supporters de Ravalomanana ne sont constitués que d'une minorité d'extrémistes merina protestants.Et pourtant, la force de Ravalomanana réside dans sa capacité à ratisser large au-delà de sa base d'électorat d'Antananarivo (et de moindre mesure de Fianarantsoa). A ceux qui ont la mémoire courte, je rappelle que lors de la dernière élection présidentielle, il a remporté haut la main Mahajanga devant ses adversaires côtiers et a même devancé Roland Ratsiraka dans son fief de Toamasina. Alors à ceux qui brandissent encore le poids de la préférence ethnique et religieuse, le temps où les experts néo-colonialistes ne voyaient pas un merina diriger Madagascar est révolu, d'autant plus que Ravalomanana est très apprécié dans le monde rural (côtiers ou merina) d'où il est lui-même issu et qui constitue 80 % de l'électorat !
Les nids de poule sous le régime de Didier Ratsiraka
Ce que beaucoup de ses détracteurs, et les journalistes étrangers en particulier, ignorent ou feignent d'ignorer, c'est que chaque malgache a chacun au moins une bonne raison de regretter Ravalomanana : un tel ce sera pour l'inscription de ses enfants et la fourniture des kits scolaires, un tel autre ce sera pour les ppn de bonne qualité, un tel autre ce sera les remblaiements des nids de poule qui se multipliaient sous le régime de Ratsiraka, un tel autre ce sera pour l'assainissement et la propreté des communes et des ruelles, un tel autre ce sera pour le transport des marchandises grâce aux routes construites par l'ancien président... Un journaliste étranger ne trouvera sans doute rien d'extraordinaire dans ces réalisations... mais ici on est à Madagascar et un homme politique qui "réalise ce qu'il dit" est une denrée rare. Ravalomanana était le premier homme politique à joindre l'acte à la parole et à raisonner en termes de résultat.Il est le moins mauvais de tous
On dit toujours que nous avons les hommes politiques que nous méritons... et Ravalomanana quand il était président n'a pas échappé à cette règle. Il est le produit d'une société extrêmement corrompue de la base au sommet, où il y a eu une dizaine de tentatives de coup d'Etat, où les chaînes publiques ont toujours été sous les ordres du pouvoir, où la priorité des pouvoirs successifs a été de dominer la scène politique (bien que l'on note quand même une certaine avancée démocratique puisque des 97% qui ont voté pour Tsiranana en 1965, nous sommes passés à 55% en faveur de Ravalomanana en 2006). Sur tous ces points, Ravalomanana n'a pas fait moins bien que ses prédécesseurs et beaucoup mieux que les auteurs du Coup d'Etat. C'est pourquoi, compte tenu de ce déficit démocratique, beaucoup d'électeurs malgaches votent rarement pour le meilleur candidat, mais pour le moins mauvais. Les électeurs malgaches ont beaucoup mûri et votent désormais intelligemment. La réélection de Didier Ratsiraka en 1996 et celle de Ravalomanana en 2006, montrent que les électeurs préfèrent faire confiance à un homme dont ils connaissent les défauts, plutôt qu'à un nouveau venu ou à la classe politique traditionnelle malgache.par Bill Razily
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire