"Je suis venu ici une dernière fois au New Hampshire pour vous remercier de m'avoir fait le Comeback Kid, et d'avoir fait de l'Amérique le Comeback country", c’était en ces termes que Bill Clinton remercia le New Hampshire. L'Etat qui, 9 ans auparavant, lui avait permis de revenir dans la course à la Maison Blanche alors que sa cote de popularité chutait de 20 points suite aux révélations sur sa vie privée et son attitude vis-à-vis de la guerre du Vietnam. Ce retour en force du candidat Clinton à un moment crucial de la campagne des primaires démocrates de 1992 nous rappelle qu'en politique, le dernier mot revient toujours aux électeurs et que la persévérance finit toujours par payer. Deux préceptes que Ravalomanana a bien compris et qui lui ont permis au bout de trois années d’exil, de faire un comeback politique malgré tous les obstacles que la Françafrique lui a dressés sur sa route.
- Ravalomanana, la bête noire de la Françafrique
La France ne retient pas l’hypothèse d’un retour au pouvoir de Marc Ravalomanana ni de sa présence physique sur le sol malgache, déclara Stéphane Gompertz (Directeur d'Afrique et de l'Océan Indien du ministère des Affaires étrangères françaises) lors de son audition auprès de la Commission des Affaires étrangères le 6 mai 2009 (1), avant de rajouter que la France devra renforcer sa coopération militaire avec les putschistes. Ce jour-là, la France savourait encore sa revanche sur l’incorruptible Marc Ravalomanana qui, rappelons-le, a infligé un affront diplomatique à la France durant la crise post-électorale de 2002. Quelques semaines plutôt, la France contribua à l’accélération de la chute du self-made man en hébergeant Rajoelina à l’Ambassade de France au moment où le mouvement Orange battait de l’aile (notons que la mutinerie du Capsat fut déclenchée deux jours après l’installation de Rajoelina à la Résidence de France et que le nouvel ambassadeur de France n’hésita pas à s’afficher avec Rajoelina le lendemain du Coup d’Etat).Mais une fois de plus, l’arrogance française (que lui reprochent souvent les anglophones) l’a poussée à prendre beaucoup de risques et à sous-estimer son adversaire. Elle ne se doutait pas qu'au fort moment de la crise de 2009, Ravalomanana a déjà préparé sa contre-offensive en déclinant l’offre d’exil de la France et en choisissant comme lieu de refuge l’Afrique du Sud, d'où il comptait organiser la Résistance à l'instar d’un certain Général de Gaulle en 1940. En réalité, il anticipait déjà le futur désenchantement de cette pseudo-Révolution Orange bricolée de toutes pièces.
- Une pseudo-révolution vouée d’avance à l’échec
Les conseillers de Rajoelina avaient beau essayé de vendre à l'opinion internationale, avec la complicité de quelques médias français, une pseudo-révolution Orange grossièrement copiée sur le modèle ukrainien, mais la Communauté internationale n'était pas dupe en qualifiant aussitôt cette prise de pouvoir anticonstitutionnelle de Coup d'Etat déguisé. Il ne peut y avoir de Révolution sans adhésion populaire. Or, ce mouvement n'a touché principalement qu'une frange de la population malgache, la classe sociale défavorisée, comparé, par exemple, à la Révolution cubaine où l’on voit représentées, à travers cette marée humaine venue acclamer l'entrée triomphale des troupes castristes à La Havane, toutes les couches sociales cubaines (2).Certes, une certaine lassitude et/ou mécontentements commençaient à gagner une partie de la population au cours du deuxième mandat de Ravalomanana (un phénomène bien connu sous le terme ‘usure du pouvoir’), mais la majorité des Malgaches n'étaient pas favorable à un Coup d'Etat, loin s’en faut. Pour s'en convaincre, le jour où Andry Rajoelina s'est proclamé en charge des affaires du pays, ses partisans ont commencé à déserter la Place du 13 mai et si l'on se souvient bien, la Place n'attirait plus que quelques centaines de partisans... lorsque la France de Sarkozy (3) lui a redonné un second souffle en hébergeant Rajoelina prétextant pour "sa sécurité" (sic), et on connaît la suite…
- Le coup de poker de Zafy Albert
Le bilan de ces trois années de crise est tellement catastrophique qu’il nous faudra au moins une vingtaine d’années avant de retrouver le niveau économique antérieur à cette crise (4), qu’il n’y aura pas de solution miracle à court terme pour bon nombre de ces centaines de milliers de nouveaux chômeurs victimes de la cupidité et de l’irresponsabilité d’un groupe de putschistes qui, à ce jour, n’ont éprouvé le moindre remords pour leurs actes. Acte de repentance que ne feront pas non plus malheureusement ces éditorialistes et pseudo-analystes politiques qui, au lieu de défendre vigoureusement les valeurs de la République, ont préféré adopter un profil bas de « neutralité », une attitude lâche qui nous rappelle celle des « pacifistes » sous le gouvernement de Vichy.J’ai débuté mon article sur une anecdote durant la campagne des primaires américains de 1992 et je le conclus sur une autre anecdote durant l’élection US de 2004. Lors de cette élection présidentielle, le monde entier ou presque, moi en premier, souhaitait la défaite de George W. Bush. Mais contre toute attente, Bush a gagné mais quand j’ai vu ces longues files d’attente historiques devant les bureaux de vote (parfois même jusqu’à minuit dans certains Etats), on ne peut que reconnaître la victoire de Bush sur Kerry et la grandeur de la démocratie. Notre éducation et l’organisation hiérarchique au sein même de notre famille font que nous, les Malgaches, ne sommes pas des "grands démocrates par nature". Un homme fait exception à cette règle : il s’appelle Zafy Albert. On saura peut-être un jour les raisons qui ont poussé le Professeur à prendre à contre-pied ses alliés politiques lors de la nomination du premier ministre de transition, mais je reste convaincu (et cela ne regarde que moi) que le Professeur ne prend pas ce genre de décision à la légère. J’ai alors envie de lui adresser ce message :
« Cher Professeur,
N’arrivant pas à vous joindre par téléphone (fictif bien sûr ^^), je vous adresse ce courrier au sujet de mon candidat à l’élection présidentielle de 2012. Il n’a peut-être pas que des qualités mais il a été réélu par 55% des Malgaches lors de l’élection présidentielle de 2006 et selon un sondage réalisé par le réseau indépendant Afrobaromètre en 2008, 68% des Malgaches continuaient à "faire confiance partiellement ou très confiance" au dernier président élu. Je pense que, grand démocrate comme vous êtes, vous deviniez où je veux en venir et je suis convaincu que vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour permettre le retour dans le calme de cet élu du Peuple.
PS : Dans le cas où vous avez déjà fait le nécessaire, veuillez ne pas tenir compte de ce courrier. »Bill Razily, 6 novembre 2011
(1) http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cafe/08-09/c0809054.asp
(2) A l'époque, Fidel Castro était perçu comme un démocrate...
(3) Je fais bien sûr la distinction entre la « France » et les « Français » qui ne sont pas toujours au courant des agissements en coulisse de leurs dirigeants. Néanmoins, j’espère qu’un jour les 25000 expatriés Français de Madagascar se réveilleront et exprimeront leur indignation face à ces actes anti-démocratiques de leurs dirigeants.
(4) A titre de comparaison, nous avons mis 6 ans avant de retrouver le revenu par habitant d’avant la crise de 2002 qui durait 8 mois.
https://www.facebook.com/notes/bill-razily/marc-ravalomanana-le-comeback-kid/240713935982580
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